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Exemple

20 mai 2013

✔ PORTRAITS DE FUMEURS DE PIPE: THIBAUT




L'accueil chaleureux qui m'a été réservé, je le dois autant à Thibaut qu'à sa compagne, Ayşe, elle aussi étudiante. La jeune femme avait mitonné des plats typiques de son pays d'origine, la Turquie: sucuk poêlé, veau sauté à la tomate et aux aromates, boulghour, feuilles de vigne et fromage blanc. Seule note hexagonale: un vin rouge du Roussillon. Nous nous accordons pour fumer ensemble plus tard, après le déjeuner. Mais qu'y aura-t-il dans nos fourneaux ? Patience. Le repas est l'occasion de faire connaissance.

"Ma première pipe, je l'ai achetée dans un bureau de tabac de Saint-Germain-en-Laye, où j'habitais à l'époque. Je l'ai d'abord bourrée à l'Alsbo Silver, car j'étais attiré par l'odeur qu'il dégageait. Mais ça me faisait tourner la tête et ça me brûlait la langue", se souvient Thibault.
Des débuts difficiles, comme c'est souvent le cas chez les pétuneurs novices. A tel point qu'il a arrêté rapidement la pipe pour revenir... à la cigarette. La "tige" revêt un aspect pratique pour un étudiant pressé et sous pression. Mais, un temps éloigné de la bouffarde, Thibault s'est rapidement senti attiré par les soirées entre fumeurs de pipe, en particulier celles organisées chez Scytale, avec les membres du forum Autour de la pipe. Retour à la pipe, donc, sans pour autant abandonner la cigarette. "La pipe, je veux que ce soit un moment pour moi. Je n'aime pas trop qu'on me regarde dans la rue, et je préfère la fumer dans un coin tranquille".

En peu de temps, notre très probable futur enseignant en lycée a sensiblement élargi son cheptel: il possède actuellement une trentaine de pipes. Quelques Gambier en terre, mais il leur préfère les bruyères. Dans cette catégorie, l'une de ses favorites est une Morel. "Mais j'aime aussi beaucoup ma Savinelli sablée, une Chiara". Curieusement, lorsque je lui fais remarquer que ses lisses chéries auraient peut-être besoin d'un soin à la cire d'abeille et d'un léger lustrage, il me répond qu'il aime bien le bois mat. Soit.

DE PANAME AU BOSPHORE

Concernant les "carburants", Thibaut a bien changé depuis les essais sucrés et entêtants de Saint-Germain. Il adore depuis peu les mélanges à base de latakia. "Mes favoris sont le Dunhill 965 et le Balkan Flake de Samuel Gawith, mais je ne les fume pas à la maison", explique Thibaut tout en lançant un regard complice en direction des yeux de sa douce. Ayşe sourit. Elle aussi fume la pipe, mais de manière occasionnelle. Les senteurs lourdement fumées en provenance de Chypre ou de Syrie ne semblent pas avoir ses faveurs. En revanche, elle ne résiste pas aux charmes d'un parfum venu du gemmage nord-américain.
Il est d'ailleurs temps de quitter la table et de s'installer côté salon. Mon hôtesse sort une longue pipe féminine et ouvre une petite boîte dans laquelle elle a conservé du Maple Street, en provenance du Canada. Un aromatique léger. 
"'Attends, j'ai autre chose pour nous", déclare Thibaut à mon intention.

C'est à ce moment-là que nous abandonnons une nouvelle fois Paris, Chinatown et le Canada. Vol direct et sans escale pour un ailleurs si proche, si lointain.
"Je voulais trouver des tabacs turcs. C'est mon copain Yves, un habitué des soirées parisiennes, qui m'a fait découvrir deux mélanges". 
Ces bonnes blagues venues d'Izmir sont produites pas l'entreprise Tabac Turc. Des mélanges très légèrement aromatiques (voir encadré ci-dessous). Ayşe les lui rapporte, lorsqu'elle retourne à Istanbul voir sa famille.

Ce lien affectif avec la Turquie et cette passion pour la pipe, Thibaut les conjugue également au travers des fameuses écumes de mer. Par internet, sa compagne et lui-même sont entrés en contact avec une Stambouliote, qui fait commerce de ces pipes venues d'Eskişehir. La rencontre n'a pas été seulement virtuelle, puisque Thibaut a rendu visite sur place à Nicky -c'est le nom de cette femme charmante, qui distribue les pipes en écume de mer de plusieurs artisans sculpteurs, les vend en ligne sur le site Meerco et sur Ebay ainsi que dans sa boutique installée dans le quartier Beylikdüzü, sur la rive européenne du Bosphore.

C'est précisément une pipe en écume offerte par Nicky que Thibaut choisit, s'installant confortablement dans son canapé rouge, fumant ce mélange d'Izmir, ultime détente avant de se concentrer sur les examens de fin d'année, cependant qu'Ayşe tire lentement sur sa churchwarden exhalant des parfums de sirop d'érable. Etonnant mélange, entre Orient et Amérique du Nord, à un étage élevé d'un immeuble parisien sans fin, entouré de criantes enseignes asiatiques.

L'entreprise "Tabac Turc", basée à Izmir, réalise deux types de mélanges, somme toute assez voisins. Tous les deux à base de tabacs orientaux, ils se présentent sous la forme de flake à la coupe assez aléatoire. Les emballages -d'un style plutôt kitsch- permettent de distinguer les deux offres: le Yayladag, très légèrement aromatisé, et le Türk, un peu plus parfumé. Mais ne vous attendez pas à des tabacs fortement aromatiques. L'un et l'autre restent légers et se fument tranquillement, le second ayant sans doute plus de caractère.

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4 commentaires :

Jean-François a dit…

---Merci, Thibault, pour ton témoignage !
---Amitiés pipiesques, JF10.

Fumeur a dit…

Super, Thibaut ! Et ce tabac turc fait envie !

Anonyme a dit…

Pipo Tütü ... mdr

Unknown a dit…

Un chouette camarade Thibault qui m'a fait découvrir effectivement ce tabac qu'il affectionne tant et j'en garde un superbe souvenir!

Merci Nicolas pour ces portraits.