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Exemple

16 novembre 2019

► Le Cornell & Diehl Speakeasy: parlons-en discrètement



Chez Cornell & Diehl, on aime cultiver l'imaginaire du fumeur, en lançant une multitude de mélanges aux noms plus ou moins mystérieux. De plus, le fabricant crée des "collections", comme Small Batch ("petite quantité") ou Cellar Series ("série à garder en cave"), dans l'idée de faire monter le désir.

Le Speakeasy fait justement partie de cette gamme de mélanges que Cornell & Diehl conseille de faire vieillir pendant 10 à 15 ans. Son nom est celui donné aux bars clandestins où, pendant la Prohibition, certains Américains venaient boire illégalement de l'alcool, écouter du jazz, danser. Le terme speakeasy (que l'on peut traduire en français par "parle doucement") ferait référence au fait qu'il convenait d'être discret en commandant une boisson alcoolisée. 

C&D joue ainsi de façon sympathique sur l'Histoire des États-Unis en donnant à ce mélange celui de ces lieux hors-la-loi. Après tout, n'allons-nous pas, à notre époque, vers une forme de prohibition? Plus lente, plus "correcte", certes, mais peut-être plus sournoise. Le tabac est le produit à abattre, sans discernement. 

Le nom speakeasy est toujours employé pour parler des bars de jazz à la Nouvelle-Orléans, et c'est aussi cette ambiance rétro que l'appellation de ce mélange veut évoquer.

Les broken flakes du Speakeasy

Il s'agit d'une composition de virginie, de perique et de kentucky grillé au feu de bois. Une pointe de rhum y serait ajoutée. Le fabricant parle de Navy Blend. À vrai dire, on s'y perd un peu dans les appellations, entre navy blend, navy flake et navy cut. Peu importe. Il s'agit ici de flakes (tabacs compressés), déjà en partie délités, mais en partie seulement. Parlons alors de broken flakes.

Cette coupe permet un bourrage facile, les brins continuant à s'émietter facilement entre les doigts. Un bonne flamme est nécessaire à l'allumage, en s'y reprenant à deux ou trois fois en tassant. Puis, la combustion démarre parfaitement. 

La prédominance du virginie est perçue nettement, un virginie à la saveur d'agrume, peut-être tempérée par la profondeur du parfum de rhum. Une agréable sensation, qui laisse place en deuxième partie à la puissance poivrée du perique. Quant à la saveur mi-noisette mi-café du kentucky, c'est étrange: pas du tout ressentie dans certaines pipes, elle l'est bien davantage dans un autre fourneau. Sans doute le vieillissement recommandé par Cornell & Diehl ferait-il fusionner le tout en un ensemble harmonieux.

Mais à y bien réfléchir, il y a dans ce côté versatile du mélange encore jeune quelque chose d'intéressant: les nuances, voire les surprises, d'une histoire encore à écrire. Comme si l'on poussait la porte d'un bar enfumé, sans savoir ce que va jouer l'orchestre ni quel cocktail on va siroter, mais en sachant que, quoi qu'il advienne, ce sera bon.
N.S


VUES

13 commentaires :

Gilmieug a dit…

Je ne connais pas le Speakeasy mais j'ai déjà fumé des Cornell and Diehl, ceux qu'on trouve en Suisse. Je n'ai jamais été déçu. C'est une très grande maison artisanale tenue par des amoureux de leur métier et de fins connaisseurs.

Chaupatatte a dit…

Super! Où peut on trouver ce tabac? J'ai hate d'y gouter.

Nicolas de Pipe Gazette a dit…

Pour l’instant, aux USA seulement.

Anonyme a dit…

Quelles sont les conditions idéales pour conserver et laisser vieillir le tabac ?

David de Nantes

Nicolas de Pipe Gazette a dit…

Des boîtes pas ouvertes, à l’abri des fortes amplitudes de températures. Donc idéalement dans une cave ou un sous-sol.

Anonyme a dit…

Comme le vin... à consommer avec modération...
Merci
David de Nantes

Anonyme a dit…

"Cool and dry is best. If you can keep it between 55 deg F and
70 deg F, you're doing well; perhaps a 65 deg F upper limit is
better still."
"DO NOT put sealed tins in the humidor! Tins are actually made
of steel, and pull-tops are aluminum, and corrosion is their
worst enemy. I've lost some remarkable old tobaccos to the
dreaded rust."

G.L. PEASE

Nicolas de Pipe Gazette a dit…

Thank you Greg for your answer.

Je traduis la réponse de G.L. Pease, grand blender américain, à propos de la conservation de longue durée des boîtes de tabac:

"Frais et sec , c'est ce qui est le mieux. Si vous pouvez les garder entre 13 °c et
21 °c, c'est bien; peut-être avec une limite supérieure de 18 degrés celcius, c'est encore mieux.

NE PAS mettre des boîtes scellées dans un humidificateur (cave à cigares)! Les boîtes sont effectivement fabriquées en métal, et les opercules sont en aluminium; la corrosion est leur pire ennemi. J'ai perdu quelques vieux tabacs remarquables à cause de la rouille".

Damien a dit…

Après des années de fumage il y a deux dénominations de tabacs qui me laissent perplexe: "Kentucky" et "Maryland". De quels espèces s'agit-il au départ, Virginia ou Burley? Comment sont-il séchés? Sont-ils étuvés, fermentés? Quelles sont leurs caractéristiques gustatives?

J'aimerais que quelqu'un puisse me renseigner, car pour l'heure je suis incapable de les reconnaître dans un blend.

D.P. a dit…

Ce sont deux tabacs originaires des états en question, même s'il en pousse ailleurs maintenant. Le Maryland est un tabac doux souvent associé au burley et qui facilite la combustion. Le kentucky est une variété de burley qui est "dark fired" donc torréfié, comme le Semois.

Alain a dit…

J’attendrai qu’il soit en Suisse si il y arrive.

Damien a dit…

Merci D.P.
:)

Joseuvic a dit…

Un nom de tabac qui colle bien à l'ambiance actuelle qui règne autour des fumeurs?
A quand des fumoirs clandestins?